Cartographier la controverse du lithium
34% des Français souffriraient de l'anxiété de la batterie vide. Une phobie qui traduit l'extrême dépendance de nos vies, professionnelles comme privées, aux technologies mobiles que nous utilisons au quotidien. Les batteries sont un élément central dans la transition énergétique. Pour réduire drastiquement les émissions de CO2, le président français a récemment annoncé qu'il allait accélérer l'électrification du parc des véhicules particuliers et intensifier les efforts pour produire des véhicules électriques sur le territoire national en totalité. Or, la production des batteries de voitures repose sur un métal indispensable à leur fabrication et que la France doit entièrement importer : le lithium, dont la demande mondiale a explosé. Récemment, du lithium a été découvert dans le sol français, notamment en Alsace, dans le fossé rhénan, où il est présent en forte concentration dans les eaux géothermales. Couplée à la géothermie profonde, son extraction est présentée par les industriels comme « verte » et « propre », ayant un faible impact environnemental. Mais ce lithium « zéro carbone » n'est pas sans risque, comme en attestent les récents séismes provoqués dans la région de Strasbourg par un projet de centrale de géothermie profonde. L'impératif de transition écologique de nos sociétés peut-il justifier des projets d'extraction qui font peser un risque sur les territoires avoisinants ? La réorientation de nos sociétés vers un avenir soucieux de notre environnement doit-il passer par l'ouverture de sites d'extraction et l'exploitation de nouveaux gisements ?
Ce workshop, animé par Clémence Seurat et Marie Lechner, propose de cartographier la controverse liée à l'exploitation du lithium en Alsace et d'initier les étudiant·es à une méthodologie d'enquête originale : la cartographie des controverses. Cette pratique pédagogique en sciences sociales apprend à regarder le monde sans séparer sciences, techniques et société. À tenir compte de tous les points de vue et du contexte dans lequel ils sont émis. À analyser finement l’écosystème qui fait naître une innovation. Pour cela, elle procède à la description minutieuse d'une situation complexe et étudie la manière dont ses acteur·ices argumentent leurs positions et rendent publics leurs désaccords.
À partir d'une sélection de documents, les étudiant·es sont invité·es à dresser un état des lieux de la controverse avant de mettre en forme les matériaux de l'enquête pour rendre compte des échanges et des disputes entre les acteur·ices. La forme de cette restitution collective est un jeu de plateau dont les règles, le gameplay et le rendu sont libres. Le travail final doit offrir des repères dans le débat qui porte sur le lithium comme l'un des enjeux clés de la transition écologique.
Objectif du workshop
- S'initier à une méthode d'enquête en sciences sociales.
- Mobiliser des savoirs et des pratiques complémentaires pour se repérer dans un débat contemporain.
- Mettre en forme une enquête.
- Expérimenter de nouveaux modes de restitution.
- Travailler en collectif sur un sujet de société.
Références de projets
- Contrevoix, une pièce sonore réalisée par Charlotte Imbault à l'issue d'une enquête sur la controverse portant sur les aménagements réalisés dans le cadre du Grand Paris à Sevran (93).
- Controverses, mode d'emploi, une publication papier et en ligne de Clémence Seurat et Thomas Tari (dir.).
- Une enquête de controverses réalisée par des étudiant·es de Sciences Po : Les rats à Paris.
- Le jeu Data Analytica de Casus Ludi et Design Friction sur les data brokers.
- Le jeu Post Growth de Disnovation.org avec Julien Maudet, Clémence Seurat, Pauline Briand & Baruch Gottlieb sur les horizons après-croissance.